Témoignage d’expérience pastorale du père Godefroid
MUTOMBW,sds
Au sortir du synode Pro-provincial(le
05-10-2013), le frère Emmanuel ENKWONO,sds a eu le courage de s’entretenir avec
le père Godefroid MUTOMBW au sujet de son expérience pastorale. Pour rappel, le
père Godefroid a commémoré cette année son jubilé d’argent de vie religieuse en
tant que salvatorien et son jubilé d’or d’âge. Voici ce qui ressort de leur entretien :
EE : Bonjour père. Lors de la
journée savatorienne de la branche masculine vous avez été choisi pour partager
votre expérience de vie pastorale aux confrères présents à Tshabula(ce jour
là). Est-ce un privilège ? Un simple hasard ?
PG :
Il a plu à la commission de formation permanente de me classer parmi ceux qui
doivent donner leur témoignage, leur expérience pastorale, non pas parce que je
suis le meilleur, mais parce que je suis actuellement l’ainé des salvatoriens
congolais résidant au pays et ayant travaillé depuis mon ordination uniquement
dans les paroisses. C’est à l’occasion de mon jubilé d’argent (25ans de vie
religieuse) et mon jubilé d’or (50 ans de vie) que je livre à mes confrères
cette petite expérience en rapport avec l’esprit missionnaire, le zèle
apostolique.
EE : Ah bon ! D’après vous
qu’est-ce qu’un missionnaire ? Et que fau-il faire pour réussir dans la
pastorale ?
PG :
Un missionnaire, comme un apôtre, c’est un envoyé de Dieu. C’est un serviteur,
un témoin du Christ parmi ses frères. Il me semble, d’après moi, que pour
réussir dans la pastorale, il faut deux éléments principaux à savoir :
l’amour des fidèles et la disponibilité pour tous. Le premier entrainant le
deuxième.
1. L’amour
des fidèles
Moi,
je dis toujours que nos paroissiens sont contradictoirement bons. Il y en a qui
pensent que nos paroissiens sont les mêmes partout dans leur façon d’agir, de
se comporter par rapport aux prêtres du point de vue pastoral. Aimer ses
paroissiens suppose les connaitre, aimer leur culture, s’intéresser à leur vie,
que ça soit dans le malheur ou dans la joie. Bref être proche d’eux. Que ces
derniers sentent que tu es un autre Christ qui se donne à eux et pour ce les
fréquenter dans leur milieu de vie, surtout dans des CEV, là où ils connaissent
les joies et les peines de la vie. Il faut s’intéresser à ce qu’ils sont et ce
qu’ils vivent., partager avec eux les réalités de la vie quotidienne.
Il
est vrai qu’en pastorale tout comme dans la vie courante tout le monde ne nous
aime pas, mais un pasteur est celui qui prend patience pour tous, même pour
ceux-là qui ne nous aiment pas. Faire la guerre à ses propres paroissiens n’est
pas une solution. Bref, le jour qu’on cesse d’aimer ses paroissiens, ce jour là
il faut faire sa valise et partir.
2. Disponibilité
pour tous
Un
pasteur est celui qui se met à l’écoute de tout le monde et même à l’écoute
d’un fou. Parce que chacun a toujours un message important à livrer. Cet écoute
se fait plus à deux niveaux : dans le bureau et au confessionnal. Ce sont
ces deux endroits qui peuvent aider le pasteur à améliorer ses relations avec ses paroissiens.
EE : Quelle expérience avez-vous faite des
catéchistes et des veuves quantà votre charge pastorale ?
PG : Partout où je suis passé, je
me suis plus occupé de la catéchèse. Et là j’ai compris que les catéchistes,
souvent considérés comme les moins instruits par rapport à nous les vaillants
ou braves prêtres, ont toujours quelque chose de meilleur à nous apprendre. Il
faut donc les écouter. Et j’ai compris que dans ce domaine, collaborer avec les
veuves est bénéfique. Avec les veuves, la catéchèse porte de bons fruits parce
qu’elles consacrent de leur temps à la tâche qui leur est confiée.
EE :
Selon vous, quel peut être le premier miracle à réaliser dans la
pastorale ?
PG : Dans notre vie, nous
confondons souvent le zèle apostolique
avec les œuvres matérielles que nous réalisons (construire les écoles,
dispensaires, pharmacies etc.) alors qu’il faut voir les choses autrement. En
plus de ces œuvres matérielles, il faut voir ce qu’aura été la relation avec Dieu, par
rapport à ses paroissiens, donc les œuvres spirituelles : visiter les
malades, organiser des récollections, donner les enseignements à tel mouvement
ou tel groupe de la paroisse parce que le premier miracle, d’après moi, dans la
pastorale que nous avons, c’est de convertir les âmes.
EE :Que retenir de votre expérience comme
curé ? Je sais que vous avez travaillé à St Francois d’Assise (Sandoa),
N.D Fatima (Kolwezi), St Abraham (L’shi),Yesu Mtumishi(L’shi) et maintenant St
Gabriel (Hewa Bora/ L’shi).
PG : Après mon parcours d’une année
comme curé à Sandoa (St François d’Assise) et ses villages, de 7 ans à Notre
Dame Fatima(Kolwezi), de 4 ans à St Abraham(Lubumbashi) et de 4 ans à Yesu
Mtumishi (Lubumbashi), je reconnais que mes deux premières affectations m’ont
vraiment édifié dans la pastorale pour être ce que je suis. Je ne suis pas un prêtre
complexé par rapport à ma charge pastorale. Je sais bien faire ce qu’on me
demande. Et je fais même plus. Je ne suis pas de ceux qui pensent que Dieu
comble son bien-aimé quand il dort et qui passent leur vie à longueur des journées
en train de tourner leurs pouces, manipuler la télévision ou le téléphone. Je
ne suis pas un curé qui reste toujours cloué dans son bureau ou dans sa cure.
J’ai appris plus à sortir, à marcher, à aller à la rencontre de mes
paroissiens. Bref, je reste convaincu que la paresse est un vice qu’il faut
combattre toute sa vie durant.
Je suis arrivé à Sandoa, « ville
qui tue les prophètes », ayant remplacé un confrère européen, la
population ne me donnait même pas 3 mois de réussite. Ils étaient sûrs que
j’allais échouer vu mon âge. Et à Fatima, les gens ne voulaient même pas de
moi, me connaissant dur de caractère. J’y suis entré comme un voleur, donc en
cachette. Me connaissant de caractère dur et le disant ouvertement, leur
paroisse ne pouvait être dirigée que par un blanc et non par un noir congolais.
J’y suis entré comme un voleur et m’imposer comme curé par mon savoir faire.
EE :
Et la force de tout cet élan missionnaire,où l’avez-vous puisée ? Est-elle
fruit de vos qualités personnelles ?
PG : Non Guelord, la force de cet
élan missionnaire ou de ce zèle apostolique, je la puise dans ma prière
personnelle et communautaire. Car la charge que j’assume est une charge qui est
confiée non pas à moi seul, mais à toute la communauté. Cette force, je la
puise aussi dans le partage d’expérience avec les confrères de la communauté,
là où règne l’amour, des joies et peines liées à notre tâche pastorale.
EE : Et le mot de la fin ?
PG : Par rapport au thème de notre
journée salvatorienne de la branche masculine, je me pose la question de
savoir : D’où venons-nous ? Où sommes-nous et où allons-nous ?
Nous devons avoir la culture de l’excellence, la culture d’apprécier aussi le
bien que les autres font et ne pas penser que ceux qui nous ont précédés dans
la tâche pastorale sont des brigands, bandits, voleurs et qu’ils n’ont rien
fait. Car un tel complexe engendre la jalousie, la haine, l’homicide et
l’assassinat. L’humilité doit caractériser notre pastorale. Pour finir, sachons
que pour chaque entreprise humaine, il ya toujours les moments de joie et ceux
de peine, la pastorale paroissiale n’en fait pas exception.
Père Godefroid MUTOBW-A-NGOY,
salvatorien
Recteur de la chapelle St Gabriel/
HEWA BORA
Et Frère
Emmanuel ENKWONO,salvatorien
Etudiant de
2ème Théologie/ Scolasticat Bx. Jean XXIII/ Kolwezi
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